Pourquoi ? C'est un mot qui l'obsède encore aujourd'hui alors que ça fait près de seize années qu'elle s'est tirée. Qui ça ? Sa mère, celle qui lui a donné la vie un beau matin d'automne il y a de ça vingt-quatre ans à Baltimore. Comment ? Comment une mère peut-elle faire ça à ses propres enfants ? Son père a bien essayé de lui expliquer, de trouver des excuses à sa femme mais Flynn a pris cette fuite comme une punition. C'était de sa faute. Bien sûr, ça n'était pas du tout lui le responsable, comment aurait-il pu l'être de toute façon ? Il était un petit garçon adorable, vif d'esprit et curieux d'apprendre. Mais il était doté aussi d'une certaine imagination qui lui a fait penser ça. Alors Flynn a grandit avant l'heure. Afin d'aider son père à s'en sortir avec eux, il s'occupe de son petit frère et de sa soeur, devenant rapidement une "maman" de substitution. Corvées, repas, emmener les petits à l'école tout en allant encore lui aussi à l'école. Ça n'a pas été facile mais contrairement à sa mère, lui ne pouvait pas partir. Mais cet abandon le poursuivra bien des années plus tard encore. C'est évidemment ce traumatisme psychologique qui va faire de lui le jeune homme qu'il est aujourd'hui. Forcé de s'armer d'une carapace solide face aux quolibets de ses camarades s'amusant de sa situation, Flynn devient très vite colérique et il ne ménage plus ses mots alors. Pour lui, ce qui compte, c'est ce qu'on fait, pas ce qu'on est ou d'où on vient. Alors oui, sa famille n'a jamais roulé sur l'or mais ça ne l'empêche en rien d'avoir la tête bien remplie. Il aurait bien sûr pu être le meilleur s'il n'avait pas eut à gérer ses deux cadets et tout le reste. Raison de plus pour lui de s'emporter malgré ses airs de petit mouton inoffensif quand on lui rabâche qu'il n'est rien parce qu'il n'a pas une cuiller en argent en bouche depuis qu'il a vu le jour. Le départ de sa mère, c'est ce qui le fera aussi fuir un bon moment les relations sentimentales. S'attacher pour lui, c'est hors de question, il ne tient pas à revivre ça. Un autre abandon, qui vous laisse avec ce goût amer au fond de la gorge, celui de ne pas se sentir assez bien pour être aimer pour ce que vos êtes. Et oui, il ne se passionne pas encore pour la psycho à l'époque mais il analyse les choses comme un vrai psy déjà.

Personne n'est parfait. Flynn est le premier à le dire, même s'il le fait en faisait des traits d'esprit. Oui, l'adolescence commence pour lui aussi. Il doit toujours s'occuper des petits mais c'est plus simple maintenant qu'ils sont tous les deux au collège. Pourquoi dire ça ? Que personne n'est parfait ? Tout simplement parce que bien qu'il soit assez populaire parmi ses camarades, monsieur se gagne aussi une belle réputation de bagarreur. Car oui, ça l'amuse de mettre en rogne certains de ses camarades, surtout ceux qui pensent avoir le dessus sur lui parce qu'il affiche une carrure de crevette. Sauf que ce n'est qu'une impression. Flynn est certes fluet mais musclé. C'est un sportif. Le sport lui a depuis longtemps apporté le moyen de décompresser et de se vider la tête. Et quand il ne veut pas courir ou jouer sur un terrain, le jeune garçon s'enferme dans ses polars, qu'il dévore souvent en quelques jours à peine. Oui, en-dessous de ses jolies bouclettes brunes, il y a un cerveau qui tourne bien. C'est pour ça aussi que malgré son arrogance et son sarcasme à toutes épreuves, Flynn reste un garçon attachant et sociable. Il a ses moments, c'est tout. Heureusement pour lui, il n'est pas seul pour affronter la jungle impitoyable qu'est la vie d'un ado. Son meilleur ami Jonah est là. Ils sont pour ainsi dire quasi inséparables. Toujours fourrés ensemble, si vous tombez sur l'un c'est que l'autre n'est pas loin. Ils sont opposés sur bien des choses mais pourtant justement complémentaires. Et c'est bien le seul qui semble le comprendre et à qui il arrive à parler -au grand dam de son père qui a tenté de le faire voir au moins une demi-douzaine de psy depuis le départ de sa mère-. Oui, ils partagent quelque chose de fort que rien n'y personne, pas même les deux amis avec qui Jonah formera un triangle amoureux à un moment donné, ne peut séparer ces deux là. En tout cas, à force de lire tous ces thrillers et autres romans policiers où il adore se glisser dans la tête des personnages pour mieux les cerner, Flynn se découvre une vraie passion pour la psychologie. Son diplôme en poche, il fera des études de pyscho, il le sait déjà. Puis comme dit, tant qu'il pourra entrer dans la tête des autres, ça évitera qu'on essaye de rentrer dans la sienne. Pratique, non ?

Princeton. l'une des facultés les plus prestigieuses de tout le pays. La fac qu'il n'aurait jamais rêvé d'intégrer il y a encore quelques années de ça parce que son père s'en sortait déjà tout juste pour leur offrir un toit au-dessus de leurs têtes et de quoi remplir le frigo -avec l'aide de Flynn qui bossait à côté bien sûr-. Alors oui, quand cette lettre est arrivée lui apprenant qu'il venait de décrocher cette bourse pour intégrer Princeton, il a cru qu'on lui faisait une farce. Mais pourquoi Princeton me direz-vous ? Pourquoi ne pas se contenter de la fac locale ? Parce que Jonah serait envoyé là-bas par son cher paternel qui ne voulait que le meilleur pour son rejeton. Et que Flynn ne se voyait pas vivre cette nouvelle vie sans son meilleur ami à ses côtés. Alors ses grands-parents rassemblent un peu d'argent et grâce à eux et à sa bourse, Flynn voit les portes de la fac de Princeton s'ouvrir à lui. Mais au-delà de cette impression d'enfin avoir ce qu'il mérite après avoir trimé pendant toutes ces années, il se sent soulagé. Il va enfin pouvoir respirer un peu. Il n'a plus à s'occuper de son frère et sa soeur. Non, maintenant il peut ne penser qu'à sa pomme et autant vous dire qu'il ne s'en prive pas. Les fêtes s'enchaînent et les rencontres aussi. Mais ça ne dure jamais bien longtemps puisqu'il ne veut toujours pas s'attacher à quelqu'un, surtout qu'il a compris depuis un moment déjà qu'il préfère les hommes. Mais il ne se permet pas non plus de l'accepter, parce que s'il sait bien une chose, c'est que les mecs sont parfois pires que les filles quand il s'agit de sentiments. Alors comme bon nombre de ses camarades sur le campus, monsieur enchaîne les histoires d'un soir. Pourquoi s'en priver ? Sa mère a fuit ses responsabilités, pourquoi lui ne pourrait pas fuir l'engagement à son tour ? Oui, on dit que le temps soigne toutes les blessures mais celle-ci reste trop vive à son goût malgré les années qui passent. Que voulez-vous, en plus maintenant qu'il a entamé ses études de psycho, il devient si facile pour lui de nier l'évidence... Mais comme dit, on est toujours plus enclin à voir la brindille dans l’œil de son voisin que l'énorme poutre qu'on a dans le sien, pas vrai ?

Je t'aime moi non plus. Il n'a rien vu venir. Enfin, disons plutôt qu'il a fait en sorte de ne rien voir parce qu'il savait très bien qu'en face, il se heurterait à cette façade que Jonah affiche toujours. Celle du mec que rien ne touche. Leur relation a pourtant bel et bien évolué depuis le temps. Les deux jeunes hommes ont beau affichés une nouvelle conquête presque chose semaine, ça ne fait que dissimuler le vrai problème. Ils ressentent plus que de la simple amitié l'un envers l'autre, il n'y a qu'à les voir décrier et se foutre de la gueule de leurs conquêtes respectives pour le comprendre. Leurs disputes se font plus nombreuses et plus vives aussi. On en est pas au point qu'ils ont atteint une fois mais bon. Cette fois-là, c'était comme si... Oui, n'ayons pas peur d'appeler un chat un chat, comme s'ils avaient rompus. Évidemment, on en était pas loin mais trop bornés l'un comme l'autre, aucun n'en a tiré les conclusions qui s'imposaient et Flynn compris surtout que Jonah ne ferait jamais le premier pas. Ça serait à lui de l'amener à abandonner sa carapace. Il avait à peu près autant de chance d'y arriver qu'un VRP envoyé vendre des frigos au pays des Esquimaux. L'amour ça rend aveugle... et foutrement con aussi. Tout part dans la surenchère. Si l'un regarde trop longtemps quelqu'un en présence de l'autre, les piques fusent. Les regards se font noirs parfois, même s'ils maintiennent les apparences devant tout le monde. Car oui, personne ne se doutent de ce qui se cache derrière ce qui ressemble tout simplement à de la taquinerie entre meilleurs potes. Et bien sûr, pour ne rien simplifier, Flynn ne parvient toujours pas à se dire qu'il est gay. Pas par honte mais parce qu'il sait que l'admettre c'est aussi admettre que les sentiments qu'il a pour Jonah sont réels et de le perdre est sûrement et de loin, sa plus grande peur. Combien de temps vont-ils donc continuer ce petit jeu du "je t'aime moi non plus", à se rendre jaloux dès que possible tout en sauvant les apparences ? Vu les têtes de mules auxquelles on a à faire, ça pourrait bien prendre l'éternité. De quoi illustrer à merveille le proverbe qui veut qu'on fasse toujours compliqué quand tout pouvait être si simple au final... Ah l'Amour, quelle saloperie d'arnaque en fin de compte n'empêche!