L'histoire de Nora commence au Danemark, il y a de cela vingt-et-un ans. Son père, Karl Alexænder Johansson, riche diplomate, mais aussi cousin de l'héritier du trône actuel, Søren Ulrik Johansson, épousait Anastasia Freya Larsson, une totale inconnue du grand public. Mais pas une inconnue pour Karl ou bien Søren du fait qu'ils se connaissaient depuis deux décennies déjà. Tous trois jouaient dans le même bac à sable. Forcément, ça crée des liens. Quand il était petit, Karl avait eu une vision prémonitoire et avait dit à Anastasia que lorsqu'ils seraient grands, ils se marieraient. Pas un parcours atypique qu'ils ont eu dans le sens où ils étaient ensemble, rompaient souvent aussi. Mais ils finissaient toujours par retomber dans les bras de l'autre. Il y avait des hauts et des bas. Ce n'était pas évident entre eux. Mais ils s'étaient fiancés. Et ils allaient se marier d'ici à quelques mois. Seulement, Karl n'eut d'autre choix que d'avancer leur mariage. Anastasia était enceinte. De trois mois déjà. Et disons que ... Et bien, que c'était mieux, surtout dans la noblesse, d'être marié avant d'avoir des enfants. Voilà pourquoi Karl avait souhaité officialiser leur union, et ce plus tôt que prévu. Un somptueux mariage fut orchestré. Ca attira même les journalistes et les caméras d'ailleurs. Un mariage suivi. Un mariage princier. Un mariage beau en paillettes et en strass. Une soirée qui a duré jusqu'au beau milieu de la nuit avant que les mariés ne se décident à grimper dans la limousine qui les attendait, direction une belle lune de miel aux Bahamas.

Enceinte jusqu'au cou, les premières contractions commencèrent au beau milieu de la nuit. Anastasia demanda à son chauffeur de bien vouloir l'emmener à la clinique qu'elle avait choisie avec Karl pour accoucher. Où était-il ? En déplacement. Il avait tout de suite lâché sa réunion avec ses interlocuteurs et avait pris son jet, croisant les doigts pour qu'il arrive à temps. Peut-être avait-il une bonne étoile. Mais il eut la chance d'arriver juste quelques minutes avant que le véritable travail ne commence. Serrant sa main, Karl encourageait sa moitié. C'était difficile pour elle. Mais quelques heures après, ils tenaient deux magnifiques poupons. Enfin, pouponnes. Deux merveilleuses petites filles. La première fut appelée Alvina Danaë -on en viendra à expliquer plus tard pourquoi elle a, finalement, un prénom à rallonge- et la seconde Adelaïde Freya. Une nouvelle vie commençait pour les jeunes mariés.  

Anastasia eut quelques soucis d'adaptation. Ou, elle savait que les premiers temps allaient être difficiles mais elle n'aurait pas cru que ça serait à ce point. Ne voulant pas que sa femme tombe en dépression, Karl prit la décision de laisser son boulot de côté durant quelques mois, privilégiant ainsi sa famille. Choix qu'Anastasia ne pouvait qu'approuver. Elle n'aurait pas souhaité qu'il manque les meilleurs moments de ses filles. Au final, Karl se prit une bonne année sabbatique. En même temps, il pouvait se le permettre. Ils avaient pas mal d'argent de côté. Et quand bien même il se mettait en arrêt, sa famille et lui ne risquaient pas de manquer quelque chose. Pour sûr. En tout cas, voir grandir ses deux filles ne pouvait être que bénéfique pour lui.

Vint le moment où Karl reprit ses voyages. Anastasia aurait préféré qu'il reste un peu plus mais elle savait aussi qu'elle ne pouvait l'enfermer dans une cage dorée et qu'il avait besoin de bosser. Le pire, c'est qu'à chaque fois qu'il partait, Anastasia s'imaginait toujours le pire. Comme une seconde vie ailleurs, une autre famille, une maîtresse. Ou que sais-je encore. Oui, elle affabulait. Beaucoup même. Anastasia avait l'esprit très imaginatif. Possessive ? Oui, elle l'était. Trop peut-être. Et certains en profitaient un peu, notamment l'hériter de la couronne du Danemark qui voyait en elle une femme fragile, crédule, mais incroyablement intelligente et belle. Søren avait toujours eu de la rancœur envers son cousin. Parce qu'il avait toujours eu un faible pour elle mais n'avait malheureusement pas eu l'occasion de concrétiser. Enfin, de sortir officiellement avec elle. Ou du moins, il avait quand même réussi à goûter au biscuit au moins une ou deux fois, et ce quelques mois avant qu'elle ne se marie. Et foutre le bordel dans le couple de son cousin était une idée qui l'enchantait au plus au point. Et s'il pouvait l'avoir définitivement auprès de lui, pourquoi pas.

Mais si on parlait un peu de Nora et de sa sœur jumelle ? Grandir dans un château, enfin, une villa immense, c'était juste un conte de fée. Nora pouvait tout faire. Une enfant pourrie gâtée. La seule chose qu'elle n'avait pas, c'était son papa qui lui manquait terriblement. Elle demandait souvent après lui. Mais il n'était que rarement là. Et ça lui pesait. Mais ce n'était pas comme s'il n'y avait aucune présence masculine dans la vie de Nora. Au contraire. Søren venait souvent voir Anastasia et ses filles. Et il jouait avec elles d'ailleurs. Y'avait des jours où il rêvait que ça soit ses filles. Et sa famille. Il aurait tant aimé s'approprier tout ce petit monde. Nora adorait Søren. Il était marrant et sympathique. Et il venait toujours avec des cadeaux. De quoi faire briller les yeux de la fillette. De temps à autre, elle lui demandait pourquoi il n'avait pas d'enfant. Il lui répondait la même chose. Et elle oubliait à chaque fois, ou presque. La relation de Nora avec sa jumelle ? Elles étaient souvent ensemble. Et ils faisaient les quatre cents coups. Quand y'avait une bêtise de faite, il était difficile de savoir qui l'avait faite. Parce qu'elles se couvraient l'une l'autre. Et comme elles étaient craquantes, les punitions ne tombaient pas vraiment.


Une vie agréable. Une vie simple. Une vie belle et riche. Pourtant, Nora allait perdre tout cela, un soir du 24 décembre. On était en 1999. La petite famille Johansson et Søren étaient au New Jersey pour une soirée diplomatique au consulat. Une belle fête en perspective. Les enfants s'amusaient. Les adultes discutaient. Søren lançait toujours quelques regards perturbants à Anastasia. Et tout bascula. Une explosion dehors. La voiture en question apprit à voler. Il y eut des cris. Des gens paniqués. Et une seconde explosion. Le bâtiment en prit un coup. Des morceaux du plafond s'écroulèrent sur les familles des diplomates. Certains furent tués sur le coup. Et d'autres furent séparés de leurs proches. Une vision d'horreur. Les sirènes des voitures de secours retentissaient, couvrant ainsi les cris. Et les pleurs.

Nora n'eut pas vraiment l'occasion de voir tout cela par ses propres yeux. Elle avait été touchée à la tête par une poutre. Enfin, le coin d'une petite poutre. Heureusement pour elle que le morceau de bois n'était pas énorme parce que ça aurait pu la tuer sur le coup. Et la petite fille brune avait perdu connaissance. Son père était mort. Il l'avait poussée, justement, pour éviter qu'elle ne soit tuée. Søren fit en sorte d'évacuer Anastasia et Adelaïde et les avait, ainsi, mises en sécurité. Mais il avait oublié Nora. Elle avait été laissée en arrière à cause du sang. Il avait jugé que tout le sang au sol, là où elle était, lui appartenait, et qu'elle était morte. Alors que ce n'était pas son sang. Mais celui de son père. Et peut-être bien aussi du mec à côté. Søren avait préféré ne prendre aucun risque. Et il avait jugé qu'il devait sauver ce qui l'était et ne pas se poser de questions.

Laissée pour morte, Nora se réveilla, néanmoins, dans un hôpital deux bonnes semaines après. Personne ne s'était manifesté. Personne n'avait demandé après elle. Les infirmières trouvaient dommage qu'une petite fille aussi mignonne soit laissée derrière. Mais elles n'étaient pas au bout de leur surprise. Car une fois réveillée, elle ne fut pas en mesure de dire qui elle était. Elle avait perdu la mémoire. Triste coup du sort pour la jolie brunette qui ne pouvait aider le personnel soignant dans sa quête d'informations concernant sa personne. Ce n’était pas très problématique. Mais on se demandait, néanmoins, si sa famille n'avait pas été tuée dans l'accident. Peu, voire personne au final, n'aurait imaginé que la réponse était toute autre et que sa famille était à l'étranger. On ne peut pas penser à tout, n'est-ce pas ?

L'une des infirmières de l'hôpital passait beaucoup de temps avec la fillette, jouant avec elle et lui lisant des histoires. Un certain lien se créa entre elles. L'infirmière, répondant au nom de Serah, se permit de l'appeler Nora-Linn au bout de deux jours. Une décision que la fillette approuva et qui allait lui permettre de se créer une nouvelle identité. De redevenir quelqu'un, en quelque sorte. Mais Serah ne se contenta pas uniquement de lui donner une identité. Elle voulait, aussi, lui donner une famille. Après tout, elle avait une bonne situation. Elle était infirmière. Son époux tenait son propre garage. Un fils de douze ans. Que demander de plus ? En plus, Nora adorait Serah. On lui demanda son avis, bien évidemment, et ce même si à huit ans, on ne comprenait pas toujours tous les enjeux. Mais Nora accepta sans détour. C'était mieux que se retrouver toute seule ou bien dans une famille qu'elle n'aimerait pas. Le temps que la procédure soit officielle, Nora resta chez les Hamilton. Ca lui donnait l'occasion de s'acclimater et de s'habituer à sa nouvelle vie, même si c'était risqué dans le sens où si on lui refusait cette nouvelle vie, ça serait dur pour elle. Très dur.

Mais elle n'eut pas de refus. Officiellement, ainsi, elle devenait Nora-Linn Hamilton. Elle allait grandir dans une famille aimante. Avec un frère plus âgé qu'elle qui ferait tout pour la protéger. Qu'il était fier, d'ailleurs, d'aller chercher sa petite sœur à l'école ! Et à chaque fois, il lui demandait si ça allait bien et si les enfants étaient gentils avec elle. Parce qu'il n'hésitait pas à botter quelques fesses s'il le fallait. Ils n'avaient pas le même sang qui coulait dans leurs veines. Mais ils étaient très proches. Pour le plus grand bonheur de Nora qui se sentait bien intégrée dans cette famille qui était la sienne à présent. Elle eut un petit temps d'adaptation à l'école. Mais heureusement qu'elle avait appris l'anglais et qu'elle le parlait couramment, et ce depuis son plus jeune âge. Sans cela, ça aurait été d'un compliqué. Mais ça aurait peut-être permis aux autorités de retrouver sa véritable famille. Niveau centres d'intérêts, Nora aimait bien la peinture. Et la musique aussi. Elle commença le violon, chose que ses parents ne purent lui refuser. Elle passait aussi un peu de temps avec son père adoptif. Elle aimait bien le regarder fouiller sous la carrosserie. Et elle était loin d'être avare en questions. Un réel supplice, parfois, pour les autres. Parce que quand elle décidait de poser des questions, elle était difficilement arrêtable. Mais ça faisait son charme, en quelque sorte. Et tout ce qu'elle voulait, elle, c'était découvrir tout ce qu'elle avait pu louper dans la vie. Ni plus. Ni moins.


Sa vie était parfaite. Elle avait tout ce qu'elle voulait. Une famille qui s'occupait d'elle. Elle ne pouvait que bien tourner. En grandissant, Nora arrêta les cours de musique. Pour se concentrer sur des choses bien plus intéressantes. Elle remettait à neuf, avec son père, et son frère, une voiture. Oh, ce n'était pas évident, certes, mais ça lui permettait de voir que la vie n'était pas facile et que parfois, fallait se salir les mains. Outre le temps qu'elle passait au garage à retaper la vieille carlingue, la jeune adolescente faisait partie de l'équipe de cheerleaders de son lycée. Elle en était, d'ailleurs, la vice capitaine. Et qui dit cheerleader disait, forcément, assister à tous les matchs, ou presque, pour supporter les joueurs. Et bien évidemment, y'avait quelqu'un ... qui était loin de laisser de marbre la jeune Nora. Il était mignon. Seulement, il attirait les filles comme des mouches. Et il n'était pas du genre à se fixer avec quelqu'un. Voilà pourquoi Nora se contentait de le regarder en silence, sans rien dire. Même si sa meilleure amie lui conseillait de foncer et qu'elle devait saisir sa chance au lieu d'attendre. Mais Nora n'en faisait rien. Peut-être parce qu'elle avait peur de perdre son image. Peut-être parce qu'elle se disait que sortir avec lui, au final, ne serait pas une si bonne idée que cela.

Seulement, tirer un trait sur le jeune Nolan était loin d'être évident. Dans le sens où le jeune homme habitait à côté des Hamilton. La chambre de ce dernier donnait sur celle de Nora. Si bien qu'ils se croisaient tous les matins quand ils ouvraient leurs volets. D'où le fait que Nora s'arrangeait toujours pour se lever avant lui. Mais il avait compris le truc. Tous les matins, ils discutaient. Et ils se rendaient au lycée séparément. Nolan ne comprenait pas pourquoi elle n'acceptait pas de sortir avec lui. Parce qu'il le lui avait proposé à quelques reprises d'ailleurs. Et elle refusait à chaque fois. Ou presque. Elle ne lui donnait, pourtant, aucune raison. Et lui perdait quelque peu patience. Il voulait comprendre pourquoi il essuyait refus sur refus. Il tentait de lui parler. Elle voulait bien parler. De tout. Sauf de ses raisons. Peut-être parce qu'elle n'en avait pas au final. Las de l'attendre, Nolan enchaînait les relations les unes après les autres. Il ne restait jamais bien longtemps avec les copines qu'il avait. Nora ? Elle se montrait plus sage et continuait de jouer les petites filles sages.

Ils se rapprochèrent, néanmoins, à la mort de la mère de Nora. Un terrible accident qui s'était produit. Un dégénéré à l'hôpital. Nora se rappelle de ce jour comme si c'était hier. Elle était à l'hôpital parce qu'elle s'était faite mal au genou après avoir joué un peu trop intensément au tennis. Nora y était pour passer une petite radio et pour être sûre que ça irait bien. Sa mère était sur le point de l'accompagner en radiologie quand ... et bien, quand elle fut interrompue. Un type, un junkie, avait débarqué à l'hôpital et il criait après tous les médecins pour avoir ... Et bien, pour avoir ses médicaments. Le truc, c'était qu'il était accroc aux médicaments et qu'il ne pouvait plus s'en passer. Il essuya plusieurs refus, les médecins ne souhaitant pas aggraver son cas. Mais il n'en fit cure. Et il sortit un flingue à la place. Les agents de la sécurité tentèrent de le stopper. Mais il avait eu le temps de tirer plusieurs coups. Serah fut touchée à l'abdomen. Nora avait plaqué les deux mains sur le ventre de sa mère pour stopper l'hémorragie. Elle fut prise en charge par le personnel médical mais la balle avait provoqué de sacrés dégâts. Et elle ne survécut pas à l'intervention.

Ce malheureux coup du sort rapprocha Nolan et Nora. Ce soir-là, il avait escaladé l'arbre adjacent à sa fenêtre et celle de Nora. Et il s'était retrouvé dans la chambre de cette dernière. Elle était couchée sur son lit, les yeux rougis, parce qu'elle avait pleuré un bon moment. Il s'était approché d'elle et s'était installé à ses côtés, la prenant dans ses bras. Elle avait continué à lui tourner le dos, mais ils se parlaient. Sa présence à ses côtés était plutôt apaisante. Si bien qu'elle finit par s'endormir dans ses bras. Ils furent réveillés par le réveil de Nora. Elle n'allait pas en cours du fait que sa mère était morte, mais elle avait complètement oublié que ... Et bien, de l'arrêter. C'était là, aussi, le signal de départ pour Nolan qui se contenta de la saluer en l'embrassant sur le front avant de partir. Elle avait eu un léger sourire. Peut-être parce qu'elle était en train de découvrir une nouvelle partie de Nolan. Une partie qu'il gardait cachée aux yeux de tous et qu'il ne dévoilait qu'à ceux qui le méritaient vraiment, en quelque sorte.

La mort de Serah affectait toute la famille qui ne savait plus où donner de la tête. Ou du moins, c'était difficile pour eux. Très difficile à dire vrai. Surtout pour le père de famille qui ... Et bien, qui s'était mis à boire. Oh, au début, ce n’était ... pas grand chose. Un verre par-ci, par-là. Mais son frère, Theo, allait souvent chercher leur père au bar. Et à chaque fois, il le ramenait ivre mort. Ou presque. L'unité de la famille, c'était Serah. Et ça avait toujours été elle. Et maintenant qu'elle était morte, Nora avait peur que ... Et bien, peur de perdre tout ce qu'elle avait. Sa famille éclatait, petit à petit. Oh, elle pouvait, bien évidemment, compter sur Nolan qui était là pour elle et qui passait en cachette chez elle d'ailleurs, venant la voir au beau milieu de la nuit si besoin était. Une chose en entraînant une autre, de fil en aiguille, ils ont fini par sortir ensemble. Et aussi par coucher ensemble. C'était peut-être, d'ailleurs, pas vraiment dans ce sens. Enfin, si Nora tentait de se reconstruire, à nouveau, petit à petit, son père, lui, se détruisait. Et c'était difficile pour Nora de le voir ainsi. Durant deux longues années, elle tenta à quelques reprises de le remettre sur les rails. Mais tout ce qu'elle avait obtenu, c'était du dédain. Des cris. Des mots méchants et horribles. Et quelques gifles. Si bien qu'elle avait fini par arrêter de se battre pour lui. Et c'est un soir, alors qu'elle n'était pas encore majeure qu'elle quitta la maison, après avoir plié ses bagages.


Nora n'avait pas décidé de quitter la maison sur un coup de tête. Au contraire, c'était mûrement réfléchi. Et puis, elle le faisait pour une bonne raison. Son entrée à l'université. C'est ce qui l'avait motivé en premier. Ca, et aussi le fait que ... Et bien, que son père avait eu des mots cruels à son encontre. Il n'avait guère été sympa avec elle qui était sa fille et elle n'avait pas vraiment supporté qu'il la traite de la sorte. Elle allait mener sa vie. Sa propre vie. Mais elle ne serait pas seule puisque Nolan rentrait, lui aussi, à l'université. Sans doute plus pour faire plaisir à Nora qu'autre chose. Mais bon. Ils s'étaient trouvés un petit appartement en bordure du campus. Et la question du loyer vint vite à se poser. Non pas qu'ils n'avaient pas un peu d'argent de côté. Mais ça allait vite s'envoler. Nora trouva la solution. Ou plutôt, la solution vint à elle quelques semaines après la rentrée universitaire alors qu'elle était à la piscine. Y'avait un shooting. Un photographe et plusieurs mannequins. Le mec est plus ou moins tombé sous son charme en la voyant. Au loin, il avait pris quelques photos d'elle. Il ne l'aborda point. Sans doute voulait-il voir si les photos rendaient bien. Il la retrouva quelques jours plus tard, à l'université, alors qu'elle était avec Nolan. Sans détour, il lui proposait de faire des photos de lingerie et autres de ce genre. Si Nora semblait ravie, c'était loin d'être le cas pour Nolan. Ce qui le dérangeait, c'était que d'autres allaient la voir en petite tenue. Nora ne l'écouta pas et accepta. Ils avaient besoin d'argent et elle ne pouvait pas se permettre de dire non.

Les photos étaient un véritable succès. Et le photographe put les revendre à un prix d'or. Et rémunérer grassement Nora qui, en quelques semaines, amassa un joli petit pactole. Le photographe flirta avec elle, à plusieurs reprises, histoire de la convaincre d'accepter de faire quelques photos de charme. Des photos un peu plus dénudées qui lui permettraient de gagner un peu plus de fric. Mais c'était un peu trop pour Nora. Il y en eut quelques-unes néanmoins, elle arrêta bien vite. Cela fut suffisant pour briser son couple avec Nolan. La jalousie l'emportait sur l'amour. Il eut des mots durs à son encontre, il pensait dur comme fer qu'elle avait baisé avec le photographe. Nora ne s'était pas laissée faire. Le ton était vite monté entre eux. Dans un accès de colère, il l'a giflée. Et elle avait une sainte horreur qu'on lève la main sur elle. Elle le quitta dans la minute qui suivit. Et il ne lui fallut que quelques heures pour s'afficher au bras d'une nouvelle fille. Elle vit rouge. Mais ça prouvait qu'il était du genre nombriliste et qu'il ne pensait qu'à lui. Ca lui faisait mal de le voir s'afficher avec d'autres filles. Peut-être que c'était pour la rendre jalouse. Et lui faire comprendre qu'elle perdait beaucoup. Nora n'en fit rien et préféra tourner la page. Elle déménagea ses petites affaires et s'installa sur le campus. Elle aurait pu se reprendre un appartement avec tout le fric qu'elle avait gagné. Mais elle n'en fit rien. Elle préférait mettre tout ça de côté pour des jours sombres. Mieux vaut prévenir que guérir, non ?

Ses études d'anthropologie se passaient bien. Ce n'était pas facile tous les jours. Mais elle s'en sortait, à sa manière. Ca lui arrivait encore de faire quelques shoots de temps à autres, mais pas des photos trop dénudées. Enfin, dans la mesure du possible, bien que ces dernières pouvaient lui ramener beaucoup d'argent. Mais ça lui attirait aussi des ennuis. Il y avait eu le cas de ce harceleur. Ce mec qui n'arrêtait pas d'envoyer des lettres, des mails, ou bien lui passait des coups de téléphone à longueur de journée. Une enquête de longue haleine. Il alla même jusqu'à se faire passer pour un mec normal, un photographe, afin de l'attirer, l'enlever et la séquestrer quelques jours. Ca se termina mal pour lui. On retrouva sa trace. Mais il ne voulait pas laisser partir Nora. Il se retrouva avec une balle dans la tête. Le policier avait super bien visé. Il aurait pu la toucher, mais non. Nora était saine et sauve et elle espérait bien oublier cette mauvaise aventure.

Autre point intéressant, les semaines ou les journées à thème. Et il y en eut une sur le Danemark. Les étudiants suédois s'en donnaient à cœur joie. Bizarrement, Nora avait l'impression que ça lui était familier. Elle s'en rendit compte quand elle croisa un blond qui, sur le coup, lui parla en danois. Nora lui répondit comme si de rien n'était. Et elle en fut surprise d'ailleurs. Ca la travailla. Son cerveau se mit en marche et commença à se poser tout un tas de questions. Se pouvait-elle qu'elle ait un rapport avec le Danemark ? Elle reprit contact avec son frère, histoire de voir s'il se souvenait de certaines choses. Mais rien ne lui vint à l'esprit. Elle commença à faire quelques recherches au sujet d'enfants disparus ou bien kidnappés. Mais elle ne trouva pas grand chose. Sans doute parce qu'elle était loin de s'imaginer qu'en réalité, elle était morte et que c'était pour cela qu'elle ne trouvait rien. En même temps, elle ne pouvait pas le savoir.

Nora désespérait un peu de trouver qui elle était. Elle avait des pistes. Mais ça ne menait nul part. Le destin la rattrapa néanmoins. Parce qu'elle fit la rencontre d'un étudiant en politique un peu spécial. De trois ans son aîné. Ils se sont rencontrés à la bibliothèque. Et il avait remarqué qu'elle s'énervait contre le pauvre ordinateur qui n'avait rien demandé. Il lui demanda si elle avait besoin d'aide. Elle secoua la tête. Alexander IIIème du nom, petit fils du roi actuel du Danemark du côté maternel. Nora connaissait sa réputation. Et elle savait qui il était. Mais quand bien même il était titré et qu'il était quelqu'un d'important, ce n'était pas pour autant qu'elle allait le traiter différemment ou bien lui lécher les bottes. Elle était comme ça. Sans ambages, Nora lui fit part de ses déboires. Et lui prenant la main, Alex en vint à lui dire qu'il l'aiderait si elle voulait bien de son aide. Cette rencontre, c'était y'a deux semaines maintenant. Et depuis, ils cherchent ensemble.